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mise en ligne le 10 octobre 2011
Ca y est. Il aura fallu que j'enfonce le clou assez fort et que, après des années de vitupérages sur les non-sens des décisions prises ou non prises par Gitoyen, que j'évoque sa dangerosité et même l'opportunité de le dissoudre.
Alors enfin, les dinosaures qui ont fondé Gitoyen en 2001 se sont réveillés. Et dans un soubresaut d'orgueil (je crains hélas que ce soit le véritable moteur) ils ont pris une décision. Faire taire la critique d'abord (faut faire les choses dans l'ordre n'est-ce pas). Réformer Gitoyen, ensuite… Oui, mais comment ?
Gitoyen est l'opérateur qu'utilise FDN pour accéder à internet. Ca coûte d'ailleurs fort cher à l'association, beaucoup plus cher que ce n'est indispensable, mais le GIE reste, pour l'instant, un socle technique sur lequel FDN est rivé. Les mutations diverses qu'il pourrait traverser ne seront donc pas sans conséquences sur l'association (et ses autres membres).
Et pourtant : le sujet ne fait pas l'objet de la moindre communication à l'extérieur du bureau.
Cet article a donc pour objet de dévoiler un peu le projet de «Nouveau Gitoyen» (NG). Je vais vous le présenter tel que je le vois, moi, avec les informations dont je dispose en tant que membre du bureau de FDN. Hélas je ne reçois les informations qu'au compte-goutte bien que je me sois déclaré très curieux et intéressé par ce projet. Notamment en tant que bénévole très fortement impliqué dans Gitoyen depuis dix ans (davantage et avec plus de constance que n'importe qui, en réalité), qui ai été chargé de toutes les fonctions (de quasi-administrateur à trésorier) et qui ai finalement été mis sur la touche pour n'être pas suffisamment «constructif» (sic).
Il faut souligner ici que les quelques personnes qui ont décidé de s'auto-proclamer les réformateurs de Gitoyen n'ont en réalité pas le pouvoir de le faire, tant que les véritables membres de Gitoyen (qui sont des personnes morales) n'en ont pas décidé ainsi.
Ainsi les changements de statuts et de contrats, ne deviendront pas réalité tant que FDN et les autres membres de l'ancien GIE ne l'avalisent pas, ce qui passe dans FDN par une décision du Bureau. Ce vote, je l'attends avec beaucoup d'inquiétude (je reviendrai sur ce point), et tout en suivant les développements actuels je veille à ce que la précipitation ne fasse pas se prendre des décisions prématurées et illégitimes, au détriment du vrai Gitoyen et surtout au détriment de FDN.
«Un groupement d'intérêt économique (GIE) est [..] un groupement doté de la personnalité morale qui permet à ses membres [..] de mettre en commun certaines de leurs activités afin de développer, améliorer ou accroître les résultats de celles-ci tout en conservant leur individualité.»
C'est la définition de Wikipédia. Le GIE est la forme légale de Gitoyen depuis 2001, qui unit ses membres avec un contrat d'une dizaine de pages. Une forme qui permet de spécifier des règles un peu contraignantes, par oppositions, on le sait, à la loi de 1901 sur le statut associatif qui est, elle, extrèmement permissive.
Or c'est vers un statut associatif que se dirige le groupe de travail NG. Et les statuts en sont fortement impactés, puisque la taille du source LaTeX du document passe de 37206 caractères à 14257. Voilà une perte de substance qui mérite d'être examinée de plus près.
L'évolution de l'objectif statutaire annonce la couleur, c'est le paragraphe le plus essentiel d'un tel document, celui qui dit autour de quoi on se rassemble et ce qu'on va faire ensemble.
Anciennement : Le groupement a pour objet d'être un fournisseur d'accès aux réseaux informatiques, d'infrastructure d'hébergement de systèmes électroniques, et de facilités de télécommunication, à l'usage de ses membres dans le cadre de leurs activités économiques ou associatives, tant nationales qu'internationales, ainsi que de prendre toutes mesures et avoir toutes activités permettant de réaliser cet objet et ce afin de fournir une offre alternative dans un but non marchand et un cadre principalement citoyen, associatif et social.
Selon le NG : L'association a pour but de faciliter l'émergence et l'existence de petits opérateurs réseaux, en particulier dans l'optique d'acentrer l'Internet.
Première différence manifeste : le NG ne se tourne plus vers ses membres mais vers les «petits opérateurs réseaux» (notion qui mériterait d'être précisée.) Cela signifie qu'il n'est plus nécessaire d'adhérer pour bénéficier des services et nous fait basculer sur un schéma beaucoup plus commercial : client / fournisseur. FDN faisant partie, si elle y adhère, au fournisseur, et toute structure commerciale pouvant être cliente.
Seconde différence : la notion de faciliter une offre alternative dans un but non marchand, associatif, social : disparaît purement et simplement.
Troisième différence : apparaît l'idée d'encourager un internet acentré, ce qui est certes cohérent avec les opinions publiques du principal auteur (Benjamin Bayart) mais aussi assez intriguant puisque Gitoyen étant un opérateur typiquement Parisien dont la volonté a toujours été de se concentrer sur un unique point de présence dans le 11ème arrondissement, on comprend mal comment il entend mettre en oeuvre de tels objectifs. Encore plus intriguante, l'intersection pour ne pas dire, le téléscopage manifeste avec l'activité de FDN, voire même de FFDN dont Benjamin est très probable futur ex-président et futur président respectivement en 2012.
Enfin il existait dans Gitoyen une règle certe non écrite, mais respectée et de nombreuses fois invoquée pour empêcher l'entrée de membres au profil commercial : qu'il y ait entre les structures commerciales et les structures à but non lucratif, au moins parité, sinon majorité de ces dernières. Une fois encore, un positionnement politique du groupement qui risque de disparaitre.
L'une des formes imposées du GIE est la solidarité entre ses membres. Dans les statuts de Gitoyen, un chapitre intitulé Droits et obligations des membres du groupement précise ce lien fort qui tient entre eux les participants. Et notamment ils sont :
Tous les membres de Gitoyen disposant d'un nombre égal de part du capital.
Dans le statut associatif par contre, il n'existe strictement rien qui impose une quelconque forme de solidarité entre les adhérents a priori. Et dans les statuts NG, aucune forme de solidarité n'est imposée non plus, alors que ce contrat entre les adhérents serait le lieu idéal pour créer ce lien.
Mais il faut reconnaitre que si Gitoyen imposait (dans ses objectifs) d'être membre pour bénéficier des services, NG au contraire n'oblige par les bénéficiaires à adhérer. A ce stade, je vais devoir commencer à parler de clients.
Certaines personnes seront toutefois membres du NG. Donc d'une certaine manière, engagées un petit peu, sur le principe, sur l'idée de la bonne foi qui découle de l'esprit du Code Civil. Rappelons pour la bonne forme l'article 1135 : Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature.
Oui c'est un peu tiré par les cheveux mais on peut essayer d'en dégader une forme de «contrat social» entre les membres. A condition toutefois d'en préciser les termes.
Gitoyen prenait à cet égard toutes les dispositions nécessaire pour éviter qu'un membre sortant ne laisse la communauté dans une situation difficile. Premièrement en faisant dépendre les décisions d'un accord unanime de tous les membres qui seraient ainsi engagés solidairement, Deuxièmement en fixant les conditions financières de participation : frais d'entrée, avancée de trésorerie pour le fonctionnement de la structure, solidarité sur les dettes. Et troisièmement en imposant le respect de délais qui permettent aux autres de se retourner :
Tout membre du groupement peut se retirer à tout moment, sous réserve qu'il ait exécuté ses obligations et moyennant un préavis adressé à l'administrateur unique ou aux administrateurs, 6 mois au moins à l'avance, par lettre recommandée AR.
Toutes ces précautions disparaissent des statuts du NG, qui tel un moulin laisse entrer et sortir librement ses adhérents, sans les tenir responsables ni solidaires des engagements que l'association aurait contracté de leur fait.
Il faut pourtant rappeler que ces dispositions ont, à plusieurs reprises, protégé FDN des abus des uns et des autres. Il faut rappeler par exemple, la folie des grandeurs de quelques participants fortunés qui, à peine le backbone de l'opérateur Gitoyen passé en gigabit, proposaient d'investir sur du matériel 10G pour permettre d'hypothétiques envolées du trafic. Il faut rappeler le départ de Placenet qui nous a aidé à finir de payer les engagements co-souscrits quand elle a claqué la porte du GIE, et plus récemment le départ de Cursys.
Et je me demande qu'est-ce qui, dans cette nouvelle structure, protègera demain FDN contre le départ précipité de telle structure commerciale, de tel indépendant aussi impulsif que fortuné, de telle association à la stabilité précaire, face à des contrats soucrits avec un opérateur dominant ou un hébergeur multinational.
Il est difficile de ne pas reconnaitre les statuts de FDN, déjà repris pour d'autres associations et ici à peine transformés par le même auteur. Et donc difficile de ne pas reconnaitre les difficultés qui vont logiquement naitre des mêmes erreurs de conception dans le pilotage de la structure.
Le bureau se réunit une fois au moins tous les six mois : ça ne suffit évidement pas, et cela veut dire qu'en l'absence de formalisme plus contraignant la structure sera pilotée par les quelques-uns qui continueront à venir aux réunions (dans Gitoyen, on sait que ce n'est rapidement plus que deux ou trois personnes alors que ces réunions sont mensuelles, à date, heure et lieu fixes).
Ce bureau a pourtant le pouvoir de souscrire les contrats, il fixe le montant des cotisations et le tarif des prestations fournies par l'association.
La rêgle du GIE était que Toutes les décisions excédant les pouvoirs des organes d'administration et de contrôle sont prises collégialement par les membres du groupement. Et si dans les textes on peut lire que Les décisions [..] sont adoptées à la majorité qualifiée de 66\%\ des voix des membres, la rêgle communément admise par les membres du GIE étant que chacun étant engagé solidairement par les décisions de la communauté, l'unanimité était requise.
Et ça me semble normal, pour ne pas dire «juste». Je trouve donc aujourd'hui assez inquiétant que cette unanimité soit présentée comme d'une rigueur excessive, paralysante, par ceux-là même qui n'ont jamais rien entrepris pour développer Gitoyen. Mais je ne voudrais pas leur faire injustice, et je dois rappeler que, effectivement, c'est un mode de fonctionnement qui m'a permi, en me positionnant fermement contre ces projets, de les bloquer. Ces règles m'ont permi d'éviter à FDN de devoir contribuer inutilement à financer un ruineux port Gigabit sur le SFINX (qui n'a jamais dépassé 40 Mbps de trafic), soit 6000 euros par an, ou au GIE de s'équiper d'un backbone 10G ce qui il y a cinq ans nous aurait mis dans une situation financière désastreuse, doublée d'une dépendance obligée vis à vis des membres qui proposaient de le sponsoriser.
Là encore je me demande ce qui va protéger FDN (je veux dire, son infrastructure et ses membres) des décisions mal informées, précipitées d'un bureau trop libre et trop peu représentatif, engagé dans une logique de moins en moins politique et de plus en plus commerciale, sur un secteur extrèmement concurrentiel (donc dangereux), sans expérience et sans moyens.
L'examen des statuts du projet NG devient ensuite assez simple. Car l'essentiel des trois pages est rempli des modalités d'usage de convocation, de réunion, de représentation etc. pour les réunions du bureau et des assemblées. Donc relativement vides de fond.
Ces statuts doivent être déposés à la préfecture de Paris, sous le nom de «Gitoyen». Mais c'est une association de personnes physiques au départ, dont FDN n'est pas membre en tant que telle. J'ignore si cela a déjà été fait, mais cela me semblerait pour le moins précipité, car si on ne peut nier la liberté des participants à s'associer librement, l'utilisation du nom du GIE relèverait d'une imposture odieuse, d'autant que FDN est fortement liée à ce nom et à son image.
Or outre leur rédaction faite en catimini (oui pour rappel, le groupe de travail NG opère sur une liste fermée et sans archives ni publiques ni privées, on ne sait donc ni exactement qui, ni quand ni sur quoi), les statuts et autres volets du projet (contrats de services, catalogue de services, modèle tarifaire) sont développés en petit comité et je me demande à quel moment il est prévu que les membres de FDN soient consultés sur les choix et directions que tout cela prend.
Y a-t-il véritablement urgence à déposer ces statuts. Y a-t-il nécessité à faire tous ces choix stratégiques et politiques dans la discrétion (les projets de contrats que j'ai eu entre les mains sont estampillés «brouillon - ne pas diffuser»). Gitoyen NG n'est-il pas supposé être un projet ouvert au bénéfice du plus grand nombre et à ce titre, n'est-il pas ouvert aux avis externes… qui est dedans et qui ne l'est pas ?
Quelque chose est entendu, moi je me suis fait «pas inviter», puis sortir, donc je ne suis pas dedans. Mon avis doit poser problème, sans doute. Mon avis, vous le connaissez désormais.
Gitoyen NG aura plusieurs implications, et bien entendu on jugera le projet essentiellement sur ses actions ou sur leur asbsence.
Je m'inquiète toutefois de la tournure que prennent les choses. Ni les modes de travail et de fonctionnement établis ne me conviennent. Ni les morceaux déjà rédigés voire officialisés ne me satisfont. Et de processus démocratique, d'ouverture il n'y a pas.
De garanties, de projet politique, social, il ne semble pas y avoir non plus. Ou de réalisme commercial (puisqu'il faut parler de fonctionnement commercial) porteur de perspectives de développement pour des opérateurs naissants (et encore moins des opérateurs locaux).
Au-delà des risques il y a les renoncements qui demain (car ma contestation est minoritaie dans le bureau) engageront FDN.
Je me demande fort ce que FDN vient faire sur cette nouvelle arche, pourquoi ça se décide dans le bureau (et encore) avec des gens dans une autre sphère, inaccessible, et sans que, à six mois de la prochaine assemblée générale, on ait commencé à effleurer le sujet avec les adhérents.
Je me demande quelle forme de choix démocratique on proposera dans quelques mois à des adhérents en les mettant devant un choix binaire aussi conséquent que de devoir soit accepter soit refuser, en bloc. Il sera bien trop tard pour se demander : et alors, sinon, quoi ? quelle alternative ? refuser c'est condamner Gitoyen, et les autres dans le GIE que deviendront-ils ? Pour le Bureau, il n'y a pas d'alternative. Vu d'ici, ça ressemble un peu à une prise d'otages. Mais la méthode ressemble un peu au processus actuel d'élection du bureau : pas tellement le choix, en somme. Refuser le NG, ce sera sauter dans le vide.
Je me demande enfin si dans ces objectifs trop courts et les ambitions abandonnées de Gitoyen il faut réengager FDN. Car à l'inverse elle pourrait tourner la page et préférer s'engager sur d'autres chemins, choisir de participer à développer la coopération, la mutualisation de ressources pour les opérateurs locaux (cette fois), et en parallèle débloquer tous ses projets qui sont aujourd'hui bloqués.
Je me demande ce qui motive de s'entêter dans l'échec Gitoyen, de se compromettre dans un NG commercial et instable, inexpérimenté. Je me demande pourquoi aujourd'hui je me sens aussi peu en phase avec le bureau.
mise en ligne le 10 octobre 2011 - page de discussion