Le «culte» du président

Ça commence à ne plus être drôle.

Au départ

Au départ, il y a 4 ou 5 ans, c'était anodin, quasi invisible. Benjamin lui-même parlait de son «fan club» et expliquait la soudaine croissance des adhésions à FDN par la série de conférences qu'il avait commencé à donner, en parallèle avec l'ouverture des accès ADSL de l'association. C'est sans doute à raison. Il a été l'inventeur et le maître d’œuvre aussi bien de ces accès haut débit que de ces conférences dans lesquelles il est inégalable (et je le déplore, car il est devenu difficilement irremplaçable).

Le mot de «fan club» étant à mon goût plutôt réducteur, je n'y adhère pas et je préfère le prendre comme une plaisanterie. Mais j'ai parfois la sensation que la stimulation idéologique de laquelle Benjamin a été à l'origine a déclenché beaucoup de suivisme, mais pas forcément toujours tellement de réflexion ni d'indépendance d'esprit, et c'est bien ce côté «suivisme» et «fanatisme» qui me déplaisait, qui fait parfois surface.

Une foi aveugle

Dimanche soir sur IRC j'ai été questionné sur la question Gitoyen par un membre de l'association. Un autre s'est rapidement joint à la conversation. Ils se disaient mal informés, voire pas informés du tout, et avouaient ne rien comprendre aux problèmes que j'ai détaillés sur ce site et sur le wiki de Gitoyen. Mes premières lignes d'explication se sont vite vues contrées, non pas sur le fond mais sur la forme par un autre participant.

Et puis il lui a suffit d'évoquer une ou deux fois que la «direction» de FDN avait toute sa confiance, ignorant semble-t-il qu'il n'y avait pas unanimité dans le bureau, mais aussi que ce mot (direction) n'existe pas dans les statuts. Que Benjamin avait déjà répondu à telle question, pour que soudain ce que j'expliquais devienne visiblement illégitime à tous. Alors on m'a dit que je faisais des «suppositions», on m'a demandé le prix de ma «boule cristal», on m'a reproché de traiter le bureau de FDN d'incompétents, on m'a dit que s'ils l'avaient décidé, alors on leur faisait confiance.

Mais sur quels éléments, sur quelle réflexion personnelle, ces contradicteurs s'appuyaient-ils ? Aucun, aucune. Il ignoraient même visiblement le fond de la problématique, et ses enjeux.

Le fait que je me base sur les documents préparatifs du projet même (que mes opposants n'avaient pas), et une longue expérience non seulement en tant que trésorier de FDN et dans Gitoyen, mais aussi d'entreprise sur des projets en marge de Gitoyen (c'est pas pour faire le prétentieux, mais je veux dire : je sais de quoi je parle quand je parle de Gitoyen et du merdier dans lequel il est en train de se lancer) ne leur a aucunement permis de mettre en question. Ni leur foi aveugle, ni la légitimité supérieure du super président, qui n'a pourtant aucune de ces expériences aucun autre membre du bureau ne les réunit au passage. La capacité d'écoute même de ce président, et de prendre en compte les arguments objectifs qui lui étaient soumis, a pourtant fait l'objet d'observations répétées par certains observateurs des débats sur ces sujets. Peu importe.

Campés sur leurs positions indéfendables, faute d'armes, ils ont alors claqué la porte de la discussion alors que je leur demandais quelles étaient les sources avec lesquelles ils espéraient me contredire : en réalité, aucune. C'étaient quoi, des kamikazes ?

Aller, Victor Hugo : « Rien n'égale la puissance de surdité volontaire des fanatismes. »

C'est ça FDN maintenant ?

Voilà qui me pousse parfois à me demander si j'ai ma place dans cette association où le culte du président et la foi immodérée en tout ce qu'il raconte sur tous sujets (y compris ceux dans lesquels il ne fait aucunement autorité), a parfois pris le pas sur tout esprit critique, tout velléité de se renseigner, tout esprit indépendant, toute neutralité.

Il est pénible de se heuter à des personnes qui ne savent pas de quoi elles parlent (et le reconnaissent d'ailleurs) mais vénèrent les paroles du grand Bayart au simple motif que c'est le grand Bayart. Cette vassalité est une plaie et si elle doit monopoliser l'espace (comme ça a été le cas hier), au détriment de dialogues construits, étayés et d'examens neutres des problèmes qui se présentent à l'association, alors ce sera sans moi.

Car, contrairement à ce qu'il dit parfois, le président n'a pas les pleins pouvoir dans FDN, et son charisme ne lui donne pas d'autre prérogatives que celles que lui accordent les statuts de l'association, à savoir un rôle de représentation et une voix prépondérante en cas de partage dans le bureau. Il serait donc appréciable pour le fonctionnement du bureau, et aussi pour celui de FDN, que le président reste ce qu'il doit être, et notamment dans l'esprit des adhérents. Fort heureusement pour le moment, cette idolâtrie semble se cantonner à quelques-uns, et plutôt sur IRC, pour le moment.

Revoilà la présirection

Que Benjamin soit un précurseur, un visionnaire, un révolutionnaire, j'en sais rien, pourquoi pas, peut-être, je m'en fous.

Que ça rende les gens débiles et gaga, que le seul sentiment de marcher dans les pas du président leur suffise à relayer n'importe quoi au prétexte qu'il l'a défendu, faut pas pousser.

FDN est supposée réunir des gens un peu éveillés, et aussi faire des choix pertinents pour l'avenir. Cela suppose de les réfléchir et là je parle des adhérents de l'association : non, il ne suffit pas de faire confiance au Bureau qui n'a pas la science infuse, et qui d'ailleurs est trop débordé pour sortir la tête du guidon et se détacher des choses, à certains égards.

N'inversons pas les rôles, FDN n'est pas une secte avec un gourou, c'est une association dans laquelle la force à penser et la force dirigeante sont les adhérents. Adhérents qu'il faut nourrir d'information neutre, régulièrement et bien avant l'AG. Le rôle d'un président est de présider et non pas de diriger. Présider c'est distribuer la parole, rythmer le débat, motiver les participants, pulser.

Vous aurez remarqué comme moi que les allusions rigolardes au «président dictateur» sont devenues plus courantes. C'est une blague bien sûr, mais une blague n'est drôle que quand elle a un petit fond de vérité. Ce qu'elle met en évidence en l’occurrence, c'est cette place hyper charismatique qui commence à déborder le rôle du président, dans son esprit, et dans l'esprit de certains adhérents.

La voix de FDN

C'est aussi pourquoi je déplore depuis un petit bout de temps cette communication autonome et individuelle par blog et conférences, l'avis du président devenant alors celui de l'association, au lieu que l'avis de l'association soit relayé par le président. Si certains sujets demandent, certes, une réactivité qui explique que le président exerce son pouvoir de représentation, rien n'est fait cependant pour rétablir la logique et la participation des adhérents.

La liste de discussion politique que j'ai réclamée il y a des années n'a pas été relayée, donc les débats sur ces sujets n'ont pas eu lieu.

Alors par exemple une simple newsletter d'information pourrait compiler dans un digest hebdomadaire des résumés ou des liens vers la multitude d'éléments qui font l'actualité et nourrir la curiosité et la culture des adhérents, avec, pourquoi pas, à côté, ce qu'en pense l'éditorialiste du moment. Un travail d'équipe, à la fois plus représentatif, plus neutre, plus résilient, que la réflexion d'une seule personne. Un groupe d'autoformation de futurs conférenciers, aussi.

Une évolution ou une rectification qui aujourd'hui, devient urgente.