Table des matières
Philosophie politique en quelques lignes
Antiquité
Antiphon d'Athènes (480-411 ACN)
Sophiste peu connu car jamais pris pour dialogue par Platon.
Hédoniste : la valeur de la vie terrestre vaut d'être soulignée et la vie présente doit être mise à profit, on n'a qu'une seule vie et on doit y prendre plaisir, mais surtout en évitant le déplaisir.
Matérialiste : On doit rechercher le bonheur dans le plaisir et la tranquilité de l'âme, dans la vie harmonieuse avec soi-même, dans la concorde. L'argent est un moyen de s'affranchir des contingences, d'être libre et heureux.
En bon sophiste Antiphon attire notre attention sur le pouvoir du langage. En bon philosophe il nous invite à réfléchir, à faire preuve d'esprit critique, à chercher à atteindre le bonheur par une meilleur connaissance de nous-mêmes, par une résolution des conflits qui nous angoissent et perturbent notre sérénité. Il nous invite à toujours nous fonder sur la logique et le bon sens, en utilisant la raison.
Thérapie
La pensée gouverne le corps aussi bien pour la santé et la maladie que pour tout le reste. La souffrance de l'âme induit la souffrance du corps (principe psychosomatique) la parole a un pouvoir thérapeutique.
- pour guérir le corps il faut d'abord guérir l'âme
- pour guérir l'âme on peut utiliser le langage
Comme Freud plus tard, la parole joue un rôle thérapeutique, mais aussi les rêves permettent d'accéder à ce qui est caché en nous. Le rêve est le signe d'une souffrance qui trouve son origine dans le passé. L'interprétation des rêves chez Antiphon se base sur la raison : « L'analyse du rêve c'est la conjecture d'un homme doué de bon sens. » Le rêve est la voie royale qui mène à la guérison.
Antiphon initiateur de la psychanalyse ?
Critique des lois
La justice n'existe pas : c'est la parole habile qui triomphe en justice. La prétendue justice de la société n'existe pas, il est plus sûr de se tourner vers la nature. Les lois entravent l'autonomie et la liberté, elles sont anti-hédonistes. Antiphon s'oppose donc aux lois et adopte une attitude libertaire, contre la culture et la civilisation.
Dans la culture grecque de l'époque des hiérarchies existent ; mieux grec que barbare, mieux citoyen qu'esclave, mieux homme que femme, mieux aristocrate que simple travailleur. Mais si on met la culture de côté pour se tourner vers la nature, tous deviennent égaux car nos besoins naturels sont les mêmes. Antiphon remet ainsi en cause l'ethnocentrisme de ses contemporains, précurseur de l'humanisme et de l'égalitarisme.
Platon d'Athènes (429-348 ACN)
Platon semble jamais parler en son nom propre, préférant se dissimuler derrière le plus célèbre des intervenants de ses dialogues : socrate.
On ne dispose d'aucun manuscrit original, les copies les plus anciennes datent du IXè siècle.
Platon effectue la première réflexion systématique sur le pouvoir politique, au travers de trois texte : La République, Le Politique et Les Lois (ce dernier étant le seul dont Socrate soit absent.)
Il a des ambitions politiques et voudrait devenir le conseiller du prince. Mais son hostilité envers le régime démocratique fait qu'il ne se verra jamais confier aucune responsabilité. Faute de pratiquer le politique, il va donc la penser et la théoriser.
La République, ou De la justice
À propos de l'État, à propos de la cité. Contient notamment l'allégorie de la caverne, et sa vision de la cité idéale.
L'âme aurait trois parties
- la partie raisonnante - la sagesse
- la partie désirante (située dans le ventre) - la tempérance
- l'âme impétueuse (située au niveau du coeur) - le courage
L'homme juste, c'est celui dont l'âme raisonnate, aidée par l'âme impétueuse, parvient à dominer l'âme désirante. Celui chez qui ces les trois vertus (sagesse, tempérance et courage) sont bien ordonnées et à leur place.
Pour la cité c'est la même logique car la cité vient de la nécessité des hommes de s'organiser malgré leurs inégalités, ce qui fait surgir des métiers et des spécialisations dans différentes fonctions. Il y aura des travailleurs pour assurer la fonction économique, des militaires pour assurer l'ordre et défendre la cité, et des gouvernants pour administrer et diriger la cité. La cité juste, c'est une cité harmonieuse et ordonnée, dans laquelle chacun fait ce qu'il doit faire et chacun reste à sa place.
Anacyclose
Platon compare et classifie les différents systèmes politiques. En partant du constat qu'ils ont tous en commun le désordre c'est-à-dire l'injustice. Il constate une dégénérescence de la cité et propose un modèle de lent et permanent déclin de la société donnant lieu à différents systèmes politiques qui se succèdent en un cycle appelé anacyclose.
À chaque étape, la dégradation des qualités est dirigeants finit par provoquer le passage au système politique suivant, dans l'ordre :
- timocratie : le régime le moins injuste, le moins mauvais. basé sur l'honneur, où les plus vertueux et les plus dignent, gouvernent.
- oligarchie : le pouvoir est entre les mains des plus riches
- démocratie : plus large participation du peuple au pouvoir (mais seulement les citoyens) et le tirage au sort peut mettre des incompétents au pouvoir…
- tyrannie : recours à un homme providentiel, qui abolit les droits et libertés, jusqu'à ce que le peuple finisse par se soulever, et remettent en place une timocratie.
La seule façons de rompre ce cycle serait pour Platon de mette en place une « cité idéale », première utopie sociale et politique de l'histoire.
La cité idéale
Société fortement hiérarchisée composée de trois groupes (tels que décrits plus haut.) Chacun fait ce qu'il doit faire sans empiéter sur les fonctions des autres groupes.
- les gouvernants commandent
- les gardiens ont la fonction militaire
- les travailleurs ont une fonction de production
Platon propose plusieurs tactiques pour légitimer la hiérarchie sociale et garantir la justice dans cette cité :
- la cité doit être dirigée par un philosophe-roi, capable de connaître le beau, le juste, le bien et le bon. L'excellence des meilleurs parmi les gardiens permet de sélectionner ces dirigeants idéaux.
- chez les gardiens tout doit être mis en commun (biens, femmes et enfants), ainsi que chez les dirigeants : pas de biens personnels = pas de risque de cupidité ou de corruption, pas de responsabilités familiales = pas de distraction de l'intérêt général
- les travailleurs sont sans risque pour lastabilité sociale donc ne sont pas concernées par cette communautarisation
Dans la communauté des dirigeants et des gardiens, les enfants sont retirés à leur mère dès la naissance, on obtient ainsi une garantie d'amour et d'égalité dans toute la société. La famille est donc supprimée. Les femmes et les hommes sont égaux car pouvant être appelés à exercer toutes fonctions. Les enfants sont éduqués par tout le monde. Les futurs gardiens doivent étudier la gymnastique et la musique, les futurs dirigeants doivent aussi travailler l'arithémtique, la géométrique et surtout la dialectique.
Les groupes devront être homogènes, disciplinés et structurés. L'éducation est un instrument de conditionnement et non d'épanouissement individuel. Les ambitions disparaissent au profit des obligations collectives.
Enfin Platon est partisan d'un eugénisme strict. L'élite doit se reproduire entre elle, et les bébés en mauvaise santé doivent être éliminés. La population doit être stable (donc régulée), les femmes doivent avoir le nombre d'enfants nécéssaires à la cité.
La propriété, la liberté individuelle et la famille sont ainsi condamnés au bénéfice de l'intérêt général : l'individu ne s'appartient pas, il appartient à la cité. C'est donc pour les groupes « supérieurs » une collectivisation totale de la vie.
La cité « idéale » se présente sous un jour fondamentalement autoritaire dans lequel l'organisation sociale, conçue pour le bonheur des hommes malgré eux, ruine toute expression individuelle et se mue en système disciplinaire.
Épicure (Grèce, 341-270 ACN)
Lucrèce (Romain, 98-55 ACN)
Sénèque (Romain, 1-65)
XVIIème siècle
Thomas Hobbes (Angleterre, 1588-1679)
Léviathan
Léviathan ou matière, forme et pouvoir de la république ecclésisatique et civile (1651)
Transiption partielle de Culture Philo / Alain Bajomée https://www.youtube.com/watch?v=8sYAaiDjf0U
L'ouvrage comprend en quatre parties.
1) de l'homme
Hobbes part d'une conception très pessimiste de la nature humaine. L'homme est pas nature un être de désir insatiable, ce qui le pousse notamment à vouloir prendre ce qu'il ne possède pas et qu'il souhaite obtenir, au détriment de ses semblables, ceux-ci étant vus comme des adversaires ou des ennemis. L'homme est donc mauvais, cupide, égoïste, vaniteux, violent, jaloux. Il est un véritable danger pour ses semblables. L'homme est un loup pour l'homme. Cette citation célèbres est presque systématiquement attachée à Hobbes qui pourtant n'est pas le premier à l'utiliser. On la trouve en effet déjà chez des auteurs latins de l'antiquité puis chez Montaigne. On la retrouvera ensuite chez schopenhauer, chez Freud, et même, un petit peu modifiés dans la comédie Le Misanthropne de Molière. Curieusement, alors que cette idée imprègne pourtant toute l'anthropologie de Hobbes, l'expression « l'homme est un loup pour l'homme » ne se trouve pas en tant que telle dans le Léviathan. C'est dans le texte « Du citoyen » qu'il écrit dix ans plus tôt, qu'elle figure en toutes lettres. Quoiqu'il en soit l'idée est bien là, l'homme est un loup pour l'homme. tout homme est par nature violent et possède une part de bestialité et Hobbes postule l'idée que la société telle que nous la connaissons fut précédée d'un état primitif, un état de nature caractérisé par une absence de société et d'état, et par un état de guerre permant, un état de peur et d'insécurité. L'état de nature, c'est la guerre de tous contre tous, toujours et partout. Quand personne n'est là pour les contrôler et les dominer, les êtres humains sont incapables de se respecter les uns les autres.
2) de l'état
Hobbes propose une solution pour sortir de l'état et d'insécurité. Pour passer de la nature à la culture, de l'état naturel à l'état politique il va falloir imaginer quelque chose qui empêche les hommes d'agir comme des loups. Ce quelque chose ce sera un pate social, un contrat social qui inspirera par la suite beaucoup de philosophes et notamment Jean-Jacques Rousseau. Par ce contrat social les hommes acceptent de se déssaisir de leur liberté naturelle pour la transférer à un pouvoir commun, un chef, un souverain absolue, à une assemblée représentative : l'état. Au lieu d'obéïr à la loi du plus fort il est choisi d'obéïr désormais à la loi du souverain, àl la loi de l'état de droit. Désormais sa volonté sera la leur. Mais pour que le contrat social soit respecté par tous, il faut nécessairement un pouvoir fort qui soit incarné par un souverain puissant, capable de susciter la crainte d'un châtiment. Seul un souverain puissant est capable de sortir les hommes d'un état aussi épouvantable que l'état de nature et de leur assurer le premier des biens qui est d'ailleurs la condition de tous les autres : la sécurité. Ce souverain puissant, ce pouvoir fort, c'est l'état personnifié dans la figure du Léviathan. Le Léviathan c'est le nom d'un monstre que l'on trouve notamment dans le mythologie phénicienne mais aussi dans la Bible, et qui se présente sous différentes formes : crocodile, serpent de mer, dragon. Il s'agit dans tous les cas d'un montre colossal qui semble tout droit sorti des enfers et qui ne peut que faire peur. Ce monstre est une métaphore de l'état et de sa puisssance politique. Comme le monstre Léviathan, l'état doit intimider ses sujets et les dissuader de désobéïr afin de maintenir le pacte social. Le Léviathan c'est le symbole du pouvoir absolu, c'est le symbole de la puissance politique de l'état seul capable d'assurer la sécurité et la liberté des hommes dans la société. Puisque les hommes sont par nature des loups pour leurs semblables, il est indispensable qu'il y ait une force contraignante qui les domine tous, à laquelle chacun obéït et devant laquelle chacun peut prévoir l'obéïssance des autres. Ce n'est qu'ainsi qu'une confiance réciproque, qu'un contrat social peut alors s'instaurer et perdurer.
3) de la communauté chrétienne
Hobbes recommande de séparer le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel, et surtout de soumettre le premier au second. Dans l'état, l'église doit être soumise à l'autorité du souverain. C'est la théorie dite « des deux glaivers » : le souverain détient à la fois le pouvoir temporel symbolisé par l'épée et le pouvoir spirituel symbolisé par la crosse. Pour Hobbes, les croyances, la religion font partie du domaine privé et elles doivent y rester. C'est pourquoi on peut le considérer comme l'un des premiers sinon le premier philosophe de la laïcité. Remarquons au passage que sous l'appellation de culte privé, Hobbes admet la coexistance de différentes religions et qu'il va même jusqu'à admettre l'athéisme ce qui est loin d'être évident au XVIIème siècle.
4) sur le royaume des ténèbres
Hobbes dresse un tableau assez terrifiant de ce que serait une vie humaine qui ne respecterait pas les principes qui sont énoncés dans les trois premières parties de son ouvrage.
Jean Meslier (France, 1664-)
Enfant précoce, remarqué et dirigé vers une carrière écclésiastique. Dans sa paroisse il est très apprécié, gentil, généreux et désintéressé. Il est très cultivé (Platon, Aristote, Érasme, Montaigne, Sénèque, Descartes…) et assez rebelle, désobéissant et anticonformiste ce qui lui vaut des rappels à l'ordre de lévéchée. Meslier rentre dans le rang parce que s'opposer serait dangereux, mais ambitionne d'aider le peuple à se sortir de sa condition. Aider ce peuple à vaincre l'oppression… donc l'église qui y participe… donc la religion sur laquelle elle se fonde… donc Dieu qui la justifie. Meslier écrit donc en catimini un ouvrage exposant ses idées, pour une publication posthume : son Mémoire.
C'est le premier ouvrage qui déclare que Dieu n'existe pas. D'autres auparavant (Protagoras, Démocrite…) avaient émis des doutes sur l'existence de Dieu, c'étaients des agnostiques. Meslier est le premier athée véritable, en affirmant que Dieu n'existe pas.
Meslier explique que Dieu est dramatiquement absent. Or il devrait se manifester, se révéler. Il devrait aussi ne pas avoir créé un monde aussi imparfait et cruel, puisqu'il est sensé être un Dieu bon. Ce sont des preuves que Dieu n'existe pas.
Jésus a existé, mais sans avoir aucun caractère divin. C'était un mystificateur, un charlatan.
Par conséquent la religion n'a aucun sens, c'est un tissu de mensonge inventé par des politiques pour contrôler et manipuler les gens. Les religions sont donc nuisibles et il faut s'en débarrasser. Il en va de même des prêtres, curés, évèques, etc. qui sont des nuisibles à éliminer.
Par suite, Meslier explique qu'il n'y a rien à espérer après la mort, et que l'âme est aussi mortelle que le corps. Pas de paradis, pas de châtiment après la mort.
Au début du 18ème siècle, le pouvoir s'appuie sur la religion pour asseoir sa domination sur le peuple et le maintenir sous son joug. Meslier expose donc que le peuple doit se révolter.
Il écrit : « Levez-vous et unissez-vous contre vos ennemis, contre tous ceux qui vous accablent de misère et d'ignorance. Rejetez toutes les vaines et supersticieuses pratiques des religions. nissez-vous tous pour vous délivrer enfin de vos misères communes. »
Athée, anticlérical et matérialiste, Meslier est aussi révolutionnaire. Il appelle à la grève générale et même au régicide, il veut que ses conceptions transforment le monde, et le débarrasser de Dieu, de la religion, de l'église, du roi, de la noblesse. Et propose un monde nouveau avec des principes édifiants :
- abolition de la propriété privée
- mise en commun des terres ainsi que de ses produits
- droit au divorce
- droit à l'union libre
- droit au plaisir
- quasi anti-spécisme
Meslier se révèle donc aussi hédoniste.
Sa pensée préfigure la révolution française mais aussi le socialisme utopique du 19ème siècle, le communisme et l'anarchisme.