Elle m'enmerde vous dis-je.
La question posée consiste à déterminer si l'usager tel qu'invoqué au second alinéa de l'article L34-2 du Code des Postes et Télécommunications peut être un professionnel, c'est-à-dire une personnel (physique ou morale) c'est à dire une personne qui elle-même relève de l'article L33-1.
Les 4 paragraphes ci-dessous sont une citation de Eve Matringe. Faut-il supprimer l’article L.34-2 CPCE?. Juriscom.net, 2011, http://www.juriscom.net/uni/visu.php?ID=1337. <hal-00630383>
L'article L. 34-2 CPCE appelle également à préciser la notion d'usager. A l'origine, ce court délai de prescription n’avait vocation à s’appliquer qu’aux actions en payement entre l’usager et le service public de (10) la Poste et de France Telecom , ce qui explique l’emploi du terme « d’usager » au lieu de celui (11) « d’utilisateur » . Aujourd'hui, dans la mesure où le texte ne distingue pas, il semble qu'il y a lieu de l'appliquer tant au particulier qu'à celui qui utilise les communications électroniques dans le cadre de son (12) activité professionnelle .
(10) Le texte actuel résulte de l’ancien article L. 126 du Code des Postes et Télécommunications, introduit par la loi no90-568 du 2 juill. 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et à France Telecom, article 41 : « La prescription est acquise au profit de l’exploitant public pour toutes demandes en restitution du prix de ses prestations présentées après un délai d’un an à compter du jour du paiement. La prescription est acquise au profit de l’usager pour les sommes dues en paiement des prestations de l’exploitant public lorsque celui-ci ne les a pas réclamées dans un délai d’un an courant à compter de la date de leur exigibilité ».
(11) Le législateur a en effet remplacé le terme « d’usager » par celui « d’utilisateur » dans l’actuel article L. 11 du CPCE qui édicte un délai de prescription annal pour les créances en payement ou en remboursement du prix des prestations du prestataires de service universel.
(12) Les juges du fond n'ont cependant pas de position unifiée. Ainsi dans un arrêt peu clair (CA Versailles, 12e ch. section 1, 5 nov. 2009, RG no08/05730), la Cour d’appel de Versailles relève que « la société X. ne peut pas être considérée comme un usager au sens de ce texte » tandis qu'elle déclare prescrites sur le fondement de l'article L. 34-2 des créances entre professionnels par un arrêt du 7 janv. 2010 (CA Versailles, 7 janv. 2010, Soc. Prodware SA c/ SFR, RG n°08/06598)
L'historique place effectivement un élément de contexte utile : le service public. Mais le texte a connu des évolutions majeures et le champ d'application peut avoir évolué lui aussi.
L'article L34-1 précise que les fournisseurs concernés sont ceux désignés dans l'article L33-1, à savoir qui procèdent à
«I.-L'établissement et l'exploitation des réseaux ouverts au public et la fourniture au public de services de communications électroniques » (alinea 1)
Les réseaux ouverts au public sont définis article L32 (3° Réseau ouvert au public) :
« On entend par réseau ouvert au public tout réseau de communications électroniques établi ou utilisé pour la fourniture au public de services de communications électroniques ou de services de communication au public par voie électronique. »
Ce qui permet de replacer l'article L34-1 dans un contexte où l'usager désigné est «le public».
Ceci n'exclut pas forcément le professionnel mais manifestement le législateur ne destine pas le texte à régir les relations entre des professionnels du secteur.
Bien au contraire la situation de l'article L34-2 dans la section III intitulée «Protection de la vie privée des utilisateurs de réseaux et services de communications électroniques.» dans un contexte (articles L34-1 et L34-3) qui fait explicitement référence à des services de communication ouverts au public.
L'article L11 s'inscrit dans le livre 1 : «sur le service postal».
On est donc hors de notre sujet.
Ce que dit la jurisprudence :
http://juriscom.net/wp-content/documents/cons20111014.pdf
page 45 : « Que la société BOUYGUES TELECOM réplique que la prescription a été interrompue en application de l'article 2248 du Code civil, la société ALEX FINANCES ayant reconnu être débitrice de cette créance dans différents courriers ; qu'en tout état de cause, la prescription de l'article L 34-2 du Code des postes n'est pas applicable en l'espèce, la société ALEX FINANCES ne pouvant pas être considérée comme un usager au sens de ce texte ; qu'enfin ce délai de prescription peut être interrompu par toute réclamation émanant de l'opérateur, ce qui a été le cas en l'espèce en l'état des différents courriers, valant mises en demeure, qu'elle a adressés ? la société ALEX FINANCES à compter du 28 février 2005 ; Considérant que l'article L 34-2 du Code des Postes et télécommunications électroniques édicte : 'La prescription est acquise, au profit de l'usager, pour toutes les sommes dues en paiement de prestations de télécommunication d'un opérateur appartenant aux catégories visées au précédent alinéa lorsque celui-ci ne les a pas réclamées dans un délai d'un an courant à compter de la date de leur exigibilité' ; Considérant que la société ALEX FINANCES ne peut pas être considérée comme un usager au sens de ce texte ; Qu'en effet, elle conclut que : - depuis janvier 2003, elle développe une activité de fournisseur d'accès en téléphonie, lui permettant d'acheminer en France sur le réseau GSM de gros volumes d'appels téléphoniques, - que cette technique est communément appelée celle du “boîtier radio” (box SIM), les cartes SIM n'étant pas reliées à des téléphones mais à des ordinateurs, permettant d'acheminer jour et nuit sur la même ligne téléphonique un très grand nombre d'appels, - qu'en sa qualité de “grossiste en minutes de télécommunications”, elle achemine sur ses lignes le trafic téléphonique de ses clients, eux-mêmes opérateurs internationaux ; Qu'il en résulte que la société ALEX FINANCES n'a pas fait usage pour elle-même des lignes téléphoniques souscrites et du service fourni par la société BOUYGUES TELECOM mais a procé dé à la commercialisation de minutes de communication auprès de ses clients, ainsi que le fait valoir la société BOUYGUES TELECOM ;
http://juriscom.net/wp-content/documents/cons20111014.pdf
pages 33 et suivantes : Effectivement la qualité d'usager ne fait pas obstacle dans ce jugement à l'application du L34-2 entre des parties qui sont toutes deux des professionnels, mais le fait est que ce moyen n'est soulevé par personne et n'est semble-t-il jamais l'objet du débat.
Les fournisseurs concernés sont explicitement (dans les deux alinéa du L34-2) ceux qui procèdent à
«I.-L'établissement et l'exploitation des réseaux ouverts au public et la fourniture au public de services de communications électroniques » (alinea 1)
mais pas ceux qui procèdent à
« l'établissement et l'exploitation des réseaux internes ouverts au public et pour la fourniture au public de services de communications électroniques sur ces réseaux. » (alinea 2)
Ainsi les FAI font partie des professionnels qui sont concernés par le L34-2 en tant que fournisseurs, mais pas, par exemple, les fournisseurs d'infrastructure qui ne proposent que des liaisons à usage interne.
Cet article est exactement le même sur le fond (seule la référence au L33-1 a été actualisée) et transféré en L34-2.
Il avait été créé par la Loi n°2001-1062 du 15 novembre 2001 - art. 29 JORF 16 novembre 2001, au titre du Chapitre V : Dispositions renforçant la lutte contre le terrorisme, qui en même temps créait le L32-3-1 qui limitait la conservation des données personnelles par les opérateurs internet et de téléphonie à un an.
Il y a donc une vraie cohérence à retrouver maintenant le L34-2 dans le livre sur la protection des données personnelles et l'intention du texte en est clarifiée : il s'agissait en raccourcissant le délai de prescription d'être en cohérence avec la durée maximale de conservation des données personnelles des abonnés.
Il y est fait référence explicitement dans cet article aujourd'hui abrogé :
art. L32-3-1, partie IV, alinéa 3 : « La conservation et le traitement de ces données s'effectuent dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. »
ce texte en novembre 2001 comme au moment de sa création en 1978 définissait les données personnelles (aka nominatives) comme suit :
loi 78-17 du 6 janvier 1978, article 4 : « Sont réputées nominatives au sens de la présente loi les informations qui permettent, sous quelque forme que ce soit, directement ou non, l'identification des personnes physiques auxquelles elles s'appliquent, que le traitement soit effectué par une personne physique ou par une personne morale. »
Il est donc clair que le contexte initial de l'emploi du terme «usager» dans l'article L34-2 est celui d'une personne physique utilisant les services d'un fournisseurs de services au public, tel qu'un FAI.
Autant le contexte actuel, explicitement celui du livre III sur la protextion des données personnelles, que l'histoire de l'ancien article L32-3-2 indiquent l'orignie et l'intention du législateur dans l'utilisation du terme «usager».
La définition du champ d'activité du fournisseur, s'agissant de fournir des services de communication ouverts au public, permet également de comprendre qu'il s'agit d'une relation entre abonné, sinon un particlier, du moins par nature un non professionnel, et un fournisseur de service.
Si cette second notion n'est pas explicitement exclusive d'un utilisateur professionnel, la première qui fixe le contexte à celui de la protection des données personnelles, ne laisse que peu de place à un «usager» qui soit aussi un professionnel du secteur des télémmunications.